samedi 26 octobre 2013

Petite annonce sur le net



Bonjour, je suis architecte et décorateur d'intérieur, j'ai conçu cet appartement  pour les petites personnes déprimées. Laissez-moi vous le présenter.

Tout d'abord, la porte d'entrée grince comme ça, à chaque fois que vous sortez ou rentrez, vous avez un accompagnement sonore à votre grand sentiment de désespoir. Elle donne sur le salon, les murs y sont noirs. Le présentoir à alcool est la plus belles choses de la pièce, suivi par le téléviseur et le sofa. Cependant, ce qu'on constate en premier, c'est comme le plafond est bas. Je vous l'ai dit, c'est un appartement pour petite personne déprimée. La proximité du plafond est fait pour exprimer la métaphore d'avoir le ciel sur les épaules et de se sentir un peu prisonnier. Du même coup, si vous rencontrez quelqu'un de grand par hasard à travers la solitude qui vous enveloppe, ce sera un important problème, ça vous donnera un excuse pour couper les liens et rester un ermite. Le même plafond et les murs sont très minces, presque de carton, de sorte que vous ne pouvez même pas vous autorisez à écouter des chansons déprimantes ou du vieux rock à plein volume, de quoi être plus frustré encore. Par contre, les voisins, eux ne se dérangent pas à être silencieux. En haut de vous, les locataires aiment faire l'amour bruyamment et à côté, ils sont des rigolos, ils rigolent tout le temps : vous n'oublierez plus que vous êtes célibataire et dépourvu d'amis, promis.

Passons à une autre pièce, la chambre des maîtres ou plutôt du maître. Elle est encore sombre, mais plus dans les teintes de brun. J'ai imprégné l'endroit d'un odeur de marijuana pour que ça donne un cachet, un petit plus. J'y ai aussi installé l'endroit le plus coloré de l'appartement : un coin où des affiches de cinéma du siècle dernier, des photos de groupes qui n'ont plus passé à la radio depuis au moins 5 ans, un sympathique pense-bête pour vous rappeler que vous vivez décidément dans le passé et n'êtes pas près d'en sortir. Le lit est confortable, mais si vous ne désirez pas autant de confort, je vous l'échange n'importe quand.


Suivant, la salle de bain, plutôt modeste. Je me suis inspirée de celles des hôtels miteux, mais n'ayez crainte, il y a un bain au moins, au cas où vous auriez des petites envies noires, je sais pas, je ne suis pas suicidaire ou quoi que ce soit, mais au cinéma, les scènes de noyade dans les bains sont toujours dramatiques. L'éclairage y est rudimentaire - comme dans chacune des pièces d'ailleurs, à quoi bon avoir beaucoup de lumière si votre vie est toute grise – se qui met en valeur le jaunâtre de la peinture blanche.

Il y a cette pièce aussi, elle est vide pour le moment.

Et finalement, il y a la cuisine, elle est petite. La table n'a que deux chaises, une pour vous et l'autre pour étendre vos pieds. Si vous en voulez une troisième parce que vous avez un chat, je peux vous en vendre une identique pour une modique somme. Le frigo garde efficacement les plats congelés. En ce qui concerne l'eau du robinet, elle a un léger goût d'oeuf pourri, je me suis dit que ça n'était pas si grave parce que les petites personnes déprimées sont en général un peu alcoolique sur les bord. Nous savons tous les deux alors que se n'est pas l'eau qui étanche leur soif...


Est-ce que ça vous plaît? Je serais ravi de vous comptez parmi mes locataires! Oh oui! Ça serait même un honneur!

©2013 Ariane B.

vendredi 25 octobre 2013

Barjavel, prends garde au briquet.




Brûle mes textes si le cœur t'en dit
Le mien me souffle de brûler ton roman
Celui que tu apprécies tant
Celui que j'ai ouvert, brisée sur mon lit
Après que tu m'ais laissée, dans le parc
T'avais pas besoin de me quitter
Pour que je décide de le commencer
Ton maudit livre aux mots embués
Parce que, même si ton amour, c'était d'l'arnaque
Moi, je dis jamais non aux livres pas chers
Tu me parlais de ton amour des lettres
Tes discours m'semblaient gratuits
Je me trompais, c'est plutôt
Que y'étaient sans prix
Mon cœur croule sur les dettes qu'hier
En une heure à peine, rapido presto
T'as pas eu vraiment honte à mettre
Sur mon compte
Pourtant tu devrais, quand on s'aimait
Tes paroles j'les buvais
Et quand on parlait
J'était plantée là à me répéter
Que chaque histoire que tu me racontes
Était un putain de trésor
Parce que je t'aimais si fort
Je t'aimais pour ton corps
Mais comme je t'aimais pour tout le reste
Je t'aimais assez pour qu'en un geste
Tu puisses m'assassiner
Que j'homicide mon bonheur
Que je pleure longtemps sans honneur
Mouillant les pages que je peine à tourner
De ton salaud de livre que tu m'as prêté
Qui reste planté là sur ma table de chevet
À l'occasion, dans ma sacoche bordélique
Je peux pas lire un chapitre sans arrêt
Sans que les miettes de ma poitrine ait la colique
De jamais t'oublier
Y'a même un passage où je t'ai souligné
Un petit bout ironique
Où mon nom est cité
Et que justement, l'Ariane est démolie.


Permets-moi de brûler ton petit roman
La Nuit des Temps
Un livre que t'as lu à l'école, évidemment
Parce que même si t'aimes jaser
T'es pas quelqu'un d'assez motivé à t'cultiver de ta propre volonté
Sur la littérature, monsieur le scientifique
Pourtant, les poètes ont de l'éthique
Eux y vont pas se sauver en courant
Quand il avoue aimer comme jamais auparavant
Aimer à la folie
Ils vont aimer jusqu'aux étoiles au lieu de les étudier
Toi je te donne une occasion d'pratique
Au lieu d'étudier ton soleil en fusion, va brûler ce que je t'ai écrit
T'en as plus besoin
À moins que tu saches pas si tu reviens.
Si tu me reviens.

©2013 Ariane B.